J'ai besoin d'intimité. Non pas parce que mes actions sont douteuses, mais parce que votre jugement et vos intentions le sont.
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Avant d’en venir au manque d’équité flagrant du processus, la première chose que je dois noter, c’est l’état de Julian. J’ai été très choquée par la perte de poids de mon ami, par la vitesse à laquelle ses cheveux se sont raréfiés et par son vieillissement prématuré. Il avait une boiterie profonde que je ne lui avais jamais vue auparavant. Depuis son arrestation, il a perdu plus de 15 kg.
Mais son apparence physique n’était pas aussi choquante que sa détérioration mentale. Lorsqu’on lui a demandé de donner son nom et sa date de naissance, il a visiblement lutté pendant plusieurs secondes pour se rappeler les deux. J’en viendrai en temps voulu à l’important contenu de sa déclaration à la fin des débats, mais la difficulté qu’il a eue à la faire était évidente ; il avait beaucoup de mal à articuler les mots et à contrôler son raisonnement.
Jusqu’à hier, dans mon for intérieur, j’étais sceptique à l’égard des affirmations selon lesquelles le traitement subi par Julian était assimilable à de la torture – ce qu’avait dit même Nils Melzer, le Rapporteur spécial des Nations Unies sur la torture – et j’étais sceptique aussi envers ceux qui suggéraient qu’il était possiblement soumis à des traitements médicamenteux débilitants. Mais après avoir assisté à des procès, en Ouzbékistan, de plusieurs victimes de tortures extrêmes, et après avoir travaillé avec des survivants de Sierra Leone et d’ailleurs, je peux vous dire qu’hier, j’ai complètement changé d’avis et que Julian présentait exactement les symptômes d’une victime de torture qui arrive en clignant des yeux dans la lumière, notamment en termes de désorientation, de confusion mentale et de réelle lutte pour affirmer un semblant de libre arbitre à travers le brouillard de l’impuissance acquise.